Bienvenue dans Behind Universe, la chronique qui vous fait littéralement voyager entre les univers (de science-fiction).
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Attention : cette chronique contient de nombreux spoilers sur les univers de science-fiction, notamment sur Halo et son univers étendu.
LA COLONISATION DES PLANÈTES
Dans Halo, comme dans de nombreux films et jeux-vidéos du même thème, les êtres humains ont réussi grâce à la technologie, à conquérir de nouvelles planètes. Une des caractéristiques de la nature humaine est l’expansionnisme et sa curiosité, c’est-à-dire le désir d’étendre son territoire et son influence au-delà des horizons connus. De plus, toutes les civilisations ont conscience que s’ils choisissent de se limiter à une planète, des problèmes liés à l’épuisement des ressources naturelles se poseront à terme, mettant alors en danger un point essentiel propre à l’homme : l’accroissement de sa population. Dans cet esprit, de nombreuses sociétés se sont ainsi développées au sein de notre galaxie dans les siècles qui ont précédés celui où nous vivons actuellement. Certaines œuvres font la critique de certains comportements de l’homme, liés à sa soif de pouvoir, à son profit personnel et à son intérêt individuel. Ils expliquent alors les moyens détournés utilisés pour obtenir ce que l’individu désir, parfois au détriment des autres. Ainsi, dans ces œuvres, on constate que des régimes se sont succédé et la corruption et l’abus de pouvoir ne les a pas épargnés. On peut notamment citer les insurrectionnistes de Halo, qui sont des opposants à l’UNSC (United Nations Space Command) et à l’Unified Earth Government. Ceux-ci luttent de manière violente et généralement terroriste en menant des actions contre le gouvernement en place. Leur motivation principale est l’indépendance. Ils cherchent à préserver leur identité territoriale, leurs coutumes et leurs traditions. Ils craignent l’abandon ou l’affaiblissement de leur propre culture locale et entendent vouloir une liberté totale, c’est-à-dire le contrôle et la maîtrise de leur devenir par leurs propres choix. Ils ont choisi d’employer le terrorisme à cet effet. D’ailleurs, ceci est la raison de la création du projet Spartan II, la défense des colonies humaines et de ses systèmes planétaires. Certaines planètes ont clairement déclaré leur indépendance ; c’est notamment le cas dans la série de Ridley Scott, Halo Nightfall. Sedra est une planète dite de la Colonie extérieure dont l’UNSC s’est désintéressée, il en va de même pour Minab, la planète natale du Spartan Holly Tanaka.
Quand le pouvoir vous monte à la tête (image tirée de Halo Legends).
De nombreux parallèles sont possibles sur le même sujet, notamment avec Star Wars car l’Empire règne d’une main de fer sur la galaxie mais il y a des opposants idéologiques qui s’opposent au régime, nous parlons de l’Alliance Rebelle, dont une des attaques emblématique est celle de l’Étoile Noire.
Dans Le Cycle Fondation de Isaac Asimov, 22000 ans se sont écoulés depuis notre Ère et un véritable empire galactique s’est formé ayant pour capitale l’hypothétique planète Trantor. Dans l’œuvre d’Asimov, plus de 25 millions de mondes ont été colonisés ; nous sommes bien loin des 800 mondes colonisés à l’apogée de la race humaine dans l’univers de Halo. Sachant que parmi ces 800 colonies toutes ne sont pas habitées par des civils car certaines sont des installations militaires ou industrielles. On voit donc que cette perspective est bien représentée dans la science-fiction actuelle.
DES AGENCES GOUVERNEMENTALES OBSCURES
Mais si nous nous concentrons plus sur les organisations qui dirigent ces empires galactiques et sur leurs buts, on remarquera une chose ; les ficelles sont tirées par des personnes haut placées et parfois mystérieuses. En effet, on a pu constater dans Halo que des aspects obscurs sont parfois mis en avant. Dans certaines circonstances, la moindre information en ligne peut être épiée, vos mouvements, vos conversations téléphoniques et vous pouvez aussi être réduit au silence. L’Office of Naval Intelligence (ONI) a joué un rôle déterminant dans cette facette de la franchise. Benjamin Giraud est victime de cette organisation dans Hunt the Truth mais au final, en accumulant les preuves, il finit par effleurer la surface des secrets les plus noirs de cette organisation cachant eux-mêmes des secrets biens plus lourds. On nuancera toutefois car ces cas restent mesurés. En effet, le but principal de l’ONI n’est pas de faire office de police des pensées, mais bien de préserver l’humanité des plus grandes menaces potentielles ou avérées qui pourraient conduire à son extinction ou à son affaiblissement. Ces interventions obscures sont employées afin de préserver leurs projets et défendre leurs intérêts, lorsqu’ils sont menacés.
L’ONI, l’organisation au cœur de l’enquête de Benjamin Giraud dans Hunt the Truth.
Dans un registre proche, écrit en 1957, on trouve le roman dystopique et d’anticipation «1984 ». Ce livre a élaboré le concept du « Big Brother is Watching You », un despote (culte de la personnalité à l’instar du régime soviétique) qui peut tout voir et tout entendre jusqu’à s’introduire dans vos pensées. L’idée est qu’éliminer toute idée de développement artistique, de sentiments et d’émotions (notamment par le biais du langage : le Novlang) pourront empêcher l’Homme d’avoir des idées révolutionnaires. Il existe aussi d’autres systèmes politiques et judiciaires dans la science-fiction s’y rapprochant. Citons par exemple la Système Sybil dans l’animé de science-fiction Psycho-Pass permettant d’analyser le comportement et la probabilité d’une personne à avoir des idées ou à commettre des actes criminels tout en émettant une solution à ce problème, en général la mort, donnée par la brigade criminelle. Le plus paradoxal dans cet univers est que les personnes sont analysées et jugées par des cerveaux d’anciens criminels car ce sont eux qui sont au final les personnes à-mêmes de détecter les tendances criminelles des citoyens. Mais tout système a sa faille. Les univers de science-fiction sur ce thème sont vastes ; « Le rapport minoritaire » de Philip.K Dick, le film « Déjà vu ».
Le mythique BIG BROTHER
UN FUTUR SOUVENT DYSTOPIQUE
Dans la SF, le futur est parfois représenté par des univers cyberpunk, certains des exemples précédemment cités en font partie, notamment l’animé Psycho-Pass ou bien encore dans Ghost in the Shell. Une telle vision de cette société est difficilement observable de nos jours, uniquement dans des villes technologiquement développées comme Tokyo ou bien Dubaï, et où les mœurs sont largement différentes de celles que nous avons actuellement en France. Le cyberpunk ou post-cyberpunk prend en compte une technologie globale évoluée, une interface homme-machine plus prononcée (comme la cybernétisation et le développement de prothèses ou de corps artificiels). Toutefois, les auteurs des univers de cyberpunk sont souvent pessimistes sur la société future. Un exemple de ville futuriste dans Halo est par exemple la Nouvelle Mombassa (très différente du Mombassa actuel) et la Nouvelle Alexandrie sur Reach (ce qui montre bien que la colonisation spatiale n’est pas une limite à l’ « univers cyberpunk » bien qu’il soit ancré à une plus petite échelle). La Nouvelle Mombassa est technologiquement très avancée ; elle possède de nombreux grattes-ciel, possède un système médical Optican de soins rapides, ou bien encore possède un surintendant IA dans le réseau central de la ville, s’occupant de la plupart des systèmes de cette dernière. Si nous parlons encore de colonisation spatiale nous pouvons évoquer deux nouvelles de Philip.K Dick adaptées en plusieurs films ; Blade Runner (de Ridley Scott : le même réalisateur que Halo Nightfall ou bien Alien, le huitième passager, le titre original du roman étant Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?) et Total Recall. Dans lesquels il est tous les deux question de la planète Mars.
Dans Blade Runner, la société est en déclin, la vision de l’auteur est pessimiste sur l’avenir et l’Humanité se voit dans l’obligation d’émigrer sur Mars à cause de la pollution et des retombées toxiques. Ce qu’ils vont trouver et fonder sur cette planète ne les rendra cependant pas plus heureux. Certes l’histoire est centrée sur la planète Terre et Mars qui se situent dans notre système solaire, mais il est intéressant de voir que dans certaines œuvres la colonisation n’apporte pas que du réconfort. Comme souvent, les romans et nouvelles de Philip K.Dick sont en avance mais l’auteur (comme de nombreux autres) sont souvent présomptueux par rapport à l’époque du déroulement de leur histoire, le pragmatisme de l’auteur est trop optimiste sur la période pour laquelle il avance ses idées (2019 : film / 1992 : livre). L’exemple le plus flagrant où le niveau technologique de notre race est trop anticipé est Retour vers le futur II ; à moins que les américains ne nous cachent en outre l’existence de leurs voitures volantes et de leurs blousons auto-séchant.
LA POLITIQUE PAR L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ?
Nous avons parlé de systèmes politiques gérés par des « I.A. » comme Sybil. On peut d’ailleurs opérer un rapprochement avec l’univers Halo, car il en est de même avec le gouverneur Sloan sur la planète Meridian. En effet, dans la campagne de Halo 5 : Guardians, on remarque que la gestion politique, militaire et administrative est confiée à cette I.A. Plus surprenant encore, elle est gardienne de l’opinion publique concernant les relations avec l’extérieur, et en particulier l’UNSC. En effet, lorsque l’équipe Osiris gagne Meridian, le gouverneur Sloan explique qu’ils ne sont pas les bienvenus, que les opinions qu’ils ont à leur propos ne sont pas positives. Celui-ci indique aussi que les intrusions de l’UNSC dans les affaires de Meridian ne sont pas appréciées et que sa coopération au bon déroulement des opérations de l’équipe Osiris sera limitée. Des réflexions ont été menées sur les capacités de gestion des I.A. des populations humaines. Contrairement aux humains, en théorie les I.A. peuvent effectuer des choix plus rationnels (sauf dans leur cycle de frénésie), sans risque de corruption ou de défaut de justice. Il semble donc que la politique menée par les I.A. soit la meilleure solution possible pour l’humanité, la plus bienveillante. Néanmoins, on retrouve souvent un problème quand à la véritable définition de la société utopique chez les I.A. Celui-ci apparaît notamment dans la place que Cortana va choisir dans la galaxie à la fin de Halo 5 : Guardians, lorsqu’elle a revêtu le Manteau de Responsabilité. En effet, d’après les œuvres des auteurs à propos de la vision qu’ont les I.A. de l’humanité, elles en arrivent souvent à la conclusion que l’homme se conduit lui-même à sa propre déchéance, à sa propose extinction, et entraîne avec lui toutes les autres formes de vies qui lui sont proches. De ce fait, si les I.A. prennent le pouvoir, elles voudront préserver la vie et malgré les Lois de la robotique d’Asimov, le paradoxe qui en découlerait serait que la plus grande menace pour la vie n’est autre que les créateurs des I.A., c’est-à-dire l’Humanité. Autrement dit, la philosophie des I.A. serait la suivante : il faut sauver les humains d’eux-mêmes.
Le gouverneur Sloan, un exemple de gestion politique par l’I.A.
Cette théorie du retournement de l’I.A. contre ses créateurs est maintenue par d’éminents scientifiques comme Stephen Hawking. Des ingénieurs travaillent actuellement sur des robots obéissants plus ou moins aux Lois d’Asimov afin de réduire au maximum ce risque potentiel que représentent les I.A. C’est aussi une manière d’étudier cet aspect et d’aborder plus sereinement (comprendre avec plus de sécurité) la création d’intelligences artificielles. Ce phénomène du retournement de l’I.A. contre ses créateurs est notamment détaillé dans Terminator. Skynet s’empare du réseau mondial, prenant le contrôle des machines, notamment de l’ingénierie permettant de disposer des moyens de produire d’autres robots et se constitue une armée d’androïdes pour exterminer la race humaine. Récemment, des lois internationales ont été rédigées pour éviter ce genre « d’ennuis » en interdisant formellement tout usage de robots automatisés sur le champ de bataille.
C’est sur cette réflexion que cette chronique se termine… en espérant que la prochaine soit plus… binaire…
Le prototype Asimo de Honda, en hommage à Isaac Asimov.
- La dystopie désigne un univers fictif contraire à une utopie. Dans les mondes dystopiques il est difficile de trouver le bonheur ou du moins, les habitants de ce monde ne s’en rendent pas compte. Ce genre de fiction est souvent utilisé pour dénoncer une idéologie, l’exploitation de l’Homme par l’Homme, les ressources s’épuisant, les dangers de la technologie, etc.
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- La Frénésie est un syndrome qui touche les intelligences artificielles dîtes « malignes » et qui est en partie due à leur propre intelligence. Soit l’I.A manque de tâches à accomplir et a trop de temps à en mourir (absence d’activité), soit elle se met à accumuler une quantité de données trop importante qui la submerge, ce qui dans les deux cas causera sa perte en passant par différents stades de folie.
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- Les Lois de la robotique : (par Isaac Asimov : écrivain russe et auteur du Cycle des Robots et de Fondation repris après le décès de ce dernier par Greg Bear, auteur de la trilogie forerunner)
Loi n°1 : Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, en restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger.
Loi n°2 : Un robot doit obéir aux ordres qui lui sont donnés par un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi.
Loi n°3 : Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi.
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Selon-vous, est-il possible que les types de sociétés évoqués puissent apparaître un jour ?
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J’adore la science-fiction et j’adore ta chronique ! Beau travail !
Merci à toi BKL3 !
Je tenais aussi à remercier Minority Damn, le talentueux musicien qui avait réalisé l’introduction musicale lors de ma dernière chronique. Je remercie aussi toutes les personnes sans qui cette chronique n’existerait probablement pas.
J’espère que ce numéro vous plaira. 🙂
En effet très bonne 🙂 Le seul petit point que j’aurais ajouté, c’est la série Person Of Interest (Christopher/Jonathan Nolan). C’est l’illustration même de ce que tu commences à évoquer avec les IAs, Sloan, Cortana… Dans la série la première IA, « La Machine » à été programmée en considérant que chaque vie à de la valeur, et déceler tout type d’attaque contre autrui. Dans les saisons suivantes, une autre IA « Samaritain » fait son apparition et est l’alter ego de la première: elle influe sur les rouages et votes politiques, n’hésite pas a ordonner à ses agents de tuer/torturer. (similitude avec les… Lire la suite »
C’est vrai, je n’ai jamais pris le temps de m’intéresser à cette série. J’ai eu le droit à un bref résumé hier, étant donné que tout le monde en parle en ce moment. ^_^
Mais oui, ça a l’air très intéressant. Peut-être que j’en parlerai dans ma future chronique, je vais me pencher sur la question. Mais en même temps c’est assez difficile d’évoquer tous les univers de SF possible. 😛
Oui en effet il y a des tas de références 🙂
Je te conseil vivement PoI, c’est une série vraiment prenante à mon sens car le jeu est crédible, les personnes bien distinctes (pas comme les Experts où tout le monde vient sur le terrain) et traitant de problèmes et/ou question morales d’actualité. Et encore je ne te parle même pas de « The Machine »!
Très belle chronique Mattaum, comme d’habitude ;D
Merci ! C’est gentil. 🙂
Excellente chronique : de très bonnes références et des explications vraiment pointues ! 🙂
Merci beaucoup, Aug ! Et merci à toi de m’avoir accompagné jusque là, le petit bout de chemin que l’on aura fait ensemble dans l’élaboration de cette chronique a été un grand plaisir pour moi !
Ce fut un plaisir partagé ! 😉
Selon-vous, est-il possible que les types de sociétés évoqués puissent apparaître un jour ?
> Nous sommes des humains non ? Nous sommes capables de toutes les conneries… (Enfin, je crois)
Si je puis me permettre, sans vouloir faire de pub… Trepalium est une série française de SF/anticipation qui traite de la société. Elle vient juste de se terminer et est passée sur Arte. Personnellement, je trouve que c’est génial que des français prennent le risque de faire une série de SF ! Les séries françaises n’ont en général jamais pris de risque… Je ne citerai pas de nom (je ne dis pas que toutes sont nules).
Toutefois, Trepalium est une très bonne série, qui dénonce et qui mène beaucoup à réflexion.
http://www.arte.tv/magazine/trepalium/fr/entretien-avec-le-realisateur-vincent-lannoo-trepalium